lunes, 12 de junio de 2017

MANTO DE LA AURORA
Manthie me hubiera gustado tanto mentirte
decirte que no hay niños hambrientos en ningún lugar de la tierra
que ninguna madre llora a su hijo despedazado por las bombas
de un piloto tranquilo
que ninguna viuda se hunde en el dolor delante del cadáver
ajeno a su amor
que ningún mendigo espera en vano la limosna enredado entre
sus harapos en un rincón de la calle eterna
Mentirte decirte
que los cementerios han cerrado sus puertas y vaciado toda la tierra
habitada por eternos durmientes de sueños jamás apagados
que no hay hermana que entierre en la sombra a su hijo sacrílego
mentirte decirte
que ningún hombre lleva en él la emoción terrible del exilio
mentirte mentirte Manthie mentirte
ni Apartheid
ni Soweto
ni Jones-Town
ni ejército en brigadas rojas
ni septiembre negro
ni el Líbano como un inmenso pastel sanguinolento
ni el pueblo errante de una Palestina sin tierra
ni Israel de historia perseguidora perseguida
mentirte
para que no conozcas nunca el odio
para que no conozcas nunca sus manos homicidas
para que no sorprendas nunca el delirio de las fieras
para que no frecuentes nunca el orgullo de la locura que sale de
sus grutas heladas
Mentirte Manthie
para amarte con inocencia

MANTE DES AURORES
Manthie j'aurai tant aimé te mentir
Te dire qu'aucun petit garçon n'a faim quelque part sur la terre
qu'aucune mère ne pleure son enfant déchiqueté par les bombes
d'un pilote tranquille
qu'aucune veuve ne s'enlise dans la douleur devant le cadavre
impossible de son amour
qu'aucun mendiant n'attend en vain l'aumône empêtré dans
ses guenilles dans un coin de rue éternelle
te mentir te dire
que les cimetières ont fermé leurs portes et vu toute la terre
habitée par d'éternels dormeurs aux rêves à jamais éteints
qu'aucun soeur n'enterre dans l'ombre son enfant sacrilège
te mentir te dire
qu'aucun homme ne porte en lui l'émotion terrible de l'exil
te mentir te mentir Manthie te mentir
ni Apartheid
ni soweto
ni Jones-Town
ni Armée en brigades rouges
ni septembre noir
ni le Liban comme unimmense gâteau sanguinolent
ni le peuple errant d'un Palestine sans terre
n'Israël d'histoire persécutée persécutrice
te mentir
pour que tu ne connaisses jamais la haine
pour que tu ne connaisses jamais leurs mains de tueurs
pour que tu ne reconnaisses jamais le délire des fauves
pour que tu ne côtoies jamais l'orgueil et la folie sortie de
leurs grottes glacées
Te mentir Manthie
pour t'aimer d'innocence

Amadou Lamine Sall, Senegal, en Miampika L-W., Voces africanas, Voix africaines. Madrid, Verbum, 2000, pp. 128-131